LÀ OÙ ATILLA PASSE…
(…les fleurs se poussent)
C’est l’histoire touchante d’un jeune homme d’origine turque qui vit à Montréal, Atilla, adopté par Michel et Julie, un couple québécois. Atilla se réconcilie avec ses origines et son passé grâce à la rencontre avec Asya, une étudiante turque de passage au Québec.
10 raisons pour aimer le film d’Onur Karaman
C’est un film…
- poétique
- qui donne un rôle important à la langue maternelle, surtout le turc
- dont le choix de musique est très bon
- dont le choix des acteurs est très réussi
- dont les dialogues entre les personnages sont profonds et méditatifs
- dont certaines images sont inoubliables
- qui donne une idée sur la cuisine turque pour les gens qui n’en connaissent pas assez.
- qui a un style
- qui traite une histoire touchante, mais d’une façon sensible et sans rendre le spectateur malheureux
- qui peut vous donner une grande envie de boire du raki (boisson alcoolisée traditionnelle turque) ou le thé turc (si vous avez arrêté de fumer, attention!)
LÀ OÙ ATILLA PASSE…est le second long-métrage d’Onur Karaman. Il a écrit, réalisé et produit des courts métrages expérimentaux dont Le Ride (2006), Stations (2009), R’en-donner (2010, présenté au Festival des films turcs de Montréal) et L’histoire d’un malade (2011). Son premier long métrage, La Ferme des Humains (2013), présenté en première au Festival du nouveau cinéma en 2013, a été très bien reçu. Je n’ai pas vu ses films auparavant, pourtant j’aimerais bien les découvrir puisque j’ai apprécié son art grâce à ce film.
Voici l’entrevue que j’ai réalisée avec Onur Karaman:
D.O: Dans le film, l’importance de parler la langue maternelle est accentuée. Veux-tu partager avec nous tes idées à propos de ce sujet?
O.K: Atilla ne pouvait pas parler sa langue maternelle dans le film parce que je voulais montrer comment il était loin de ses origines. On pense dans notre lange maternel et cela signifie notre racine. Si tu viens de quelque part et que tu ne parles pas la langue de ce pays, cela veut dire que tu n’es pas en lien avec ta racine et tu n’embrasses pas toute la culture de tes origines.
D.O: Comment tu as choisi les musiques du film?
O.K: J’ai passé beaucoup de temps à choisir les musiques. Je voulais qu’elles présentent un beau mixte de hip (c’est le côté québécois), très mélancoliques (c’est le film) et orientales (c’est le côté turc). Également, j’ai mis dans le film une chanson de Baba Zula que je voulais toujours l’utiliser.
D.O: Le lien entre les deux cultures, turque et québécoise était bien traité. Qu’est-ce que tu en penses?
O.K: Merci. Dans ma vie, j’ai eu un peu le même problème qu’Atilla; quand j’étais plus jeune, je ne savais pas trop si j’étais turc, québécois ou canadien. Je crois que tous les jeunes immigrants vivent cette confusion d’une manière ou d’une autre. Au fur et à mesure qu’on grandit, on réalise que l’importance n’est pas se fermer dans une boîte, mais s’épanouir avec tout ce qu’on peut. Avec le film, c’est ce que j’essaie de faire; encourager à s’épanouir et prendre les plus beaux côtés de chacune des cultures.
D.O: Comment tu as eu l’idée de cette histoire et comment c’était le cheminement d’écriture?
O.K: Évidemment, il y a plusieurs couches quand on écrit un scénario. Quand je l’avais écrit, initialement, il n’y avait pas le personnage Ahmet. Plus tard, quand j’ai reçu le financement, j’ai pensé d’ajouter un autre caractère turc au film. J’ai voulu enrichir l’histoire et je voulais y mettre plus de mysticisme à travers Ahmet. Récemment, j’ai trouvé un cahier de notes et j’ai vu que j’avais commencé à écrire l’histoire en 2010 avant même de mon premier film. J’écris trois différents scénarios à la fois. J’aime écrire des scénarios. C’est dur à expliquer, mais si tu me demandes l’émotion du départ, je te dirais que c’est « les adieux ». J’ai grandi en faisant des adieux chaque fois que je quittais un pays; Turquie, Québec ou Algérie. Chaque fois que je déménageais, c’était quelque chose que je haïssais. Pour moi, ce scénario était juste une façon de faire la paix entre l’âme et la dureté de la vie parce qu’un moment donné, on doit savoir dire adieu à quelque chose qu’on aime; le film parle de cette réalité. La vie est tellement plus forte que nous, il n’y a aucune manière de la contrôler, sinon la vie t’écrase. Il faut accepter cette vérité.
D.O: Comment tu as fait le choix des acteurs?
O.K: Dans ma tête, j’avais déjà Roy Dupuis pour le rôle Michel. Il était la meilleure incarnation de ce personnage; un caractère distant, silencieux, qu’on commence à le connaître et l’apprécier au fur et à mesure. Pour choisir Atilla, on a passé beaucoup d’auditions. Émile incarnait très bien Atilla; charmant, qui a une belle voix et un genre de jeu «non-dit» qui est assez fort. Et puis, la caméra l’aime beaucoup.
D.O: Les questionnements existentiels passent à travers les dialogues profonds dans le film. Est-ce que c’est ton style en général ou c’était le sujet du film qui convenait à ce genre de dialogues?
O.K: Je te dirai que j’ai une nature assez contemplative. Cette nature convenait bien au film, mais cela va me suivre au long de ma démarche comme cinéaste. J’aime ce questionnement parce que cela m’aide à découvrir la vie.
« J’ai essayé de bien comprendre et retrouver la solitude d’Atilla… »
- Émile Schneider
Et j’ai eu certaines questions pour le charmant acteur Émile Schneider qui a incarné Atilla avec un grand succès:
D.O: Tu as quel âge? Comment c’était ton expérience d’incarner un adolescent?
E.S: J’ai 26 ans. Atilla est plus jeune que moi, environ 21 ans, mais on ne connait pas son âge dans le film. Il est un jeune homme confus qui est encore dans sa crise d’adolescent. Il cherche sa place dans ce monde. Et ce questionnement existe également chez des gens plus âgés. Pour comprendre Atilla, il n’est pas nécessaire d’être un adolescent.
D.O: Tu es québécois, mais tu incarnes un jeune homme turc dans le film. Et tu le fais très bien! Comment tu t’es préparé pour ce rôle?
E.S: Merci. Pendant le processus, j’ai écouté beaucoup de la musique turque, j’ai lu beaucoup sur la culture turque et j’ai regardé plein de films. C’est dur d’apprendre le turc, mais j’ai même appris quelques mots. Pour me préparer au rôle, j’ai étudié le scénario en allant à la profondeur, surtout l’histoire. J’ai essayé de bien comprendre et retrouver la solitude d’Atilla de bien saisir son questionnement sur le monde et son malaise.
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Là où Atilla passe…
Québec. 2015. Réal.: Onur Karaman. 89 min.
Avec: Émile Schneider, Roy Dupuis, Julie Deslauriers, Cansel Elçin, Dilan Gwyin, Belit Özükan
Version originale française et turque avec sous-titres anglais
En salles depuis le 29 janvier
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Atilla (Émile Schneider), un jeune homme reclus passe le plus clair de son temps dans la cave de la maison familiale à faire ses modèles d’avions. D’origine turque, Atilla a été adopté alors qu’il était enfant par Michel (Roy Dupuis), un policier taciturne et Julie (Julie Deslauriers), mère au bord de la crise de nerfs qui ne tardera pas à quitter la maison. Dans le restaurant où il travaille il fait bientôt la connaissance de Ahmet (Cansel Elçin), un cuisinier originaire lui aussi de Turquie qui lui fait faire la connaissance de ses amis. Parmi eux, la jolie Asya (Dilan Gwyin), une étudiante turque de passage au Québec avec qui il tombe amoureux…
Duygu Özmekik / Bizim Anadolu / 02 février 2016
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